Conflit Israël-Palestine : Les Masques Diplomatiques des États Africains
Lomé, 18 octobre 2023 (Lomé Actu)- Depuis des décennies, le conflit entre Israël et la Palestine a divisé la communauté internationale, suscitant des débats passionnés et des alignements géopolitiques complexes. En Afrique, la question du soutien à Israël ou à la Palestine est un dilemme qui souligne le double visage des États africains, oscillant entre des intérêts économiques, historiques et géopolitiques.
Le début du nouveau conflit entre les deux Etats
La guerre entre Israël et le Hamas a été déclenchée le 7 octobre 2023 par une série d’attaques de grande envergure menées par la Chambre des opérations conjointes de la résistance palestinienne, appelée opération Déluge d’al-Aqsa. Ces attaques terroristes, appuyées par le Hamas, le Jihad islamique palestinien, le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) et le Front démocratique pour la libération de la Palestine (FDLP), sont les plus meurtrières depuis la création d’Israël en 1948, causant la perte de plus de 1 300 vies, principalement civiles, en trois jours seulement.
Le conflit débute par des milliers de tirs de roquettes et l’infiltration de militants du Hamas dans les villes et kibboutzim entourant la bande de Gaza, à l’aide de deltaplanes motorisés, par terre, mer et air, infligeant des violences et des prises d’otages parmi les civils et les soldats israéliens. En réponse, Israël lance l’opération Épées de fer, comprenant des bombardements aériens, le « blocus complet » de la bande de Gaza et des opérations au sol à partir du 13 octobre. Cette riposte provoque la mort de plus de 2 200 civils et combattants palestiniens, le déplacement de plus de 400 000 civils, et au moins 1 000 personnes portées disparues.
Au-delà de l’horreur du conflit israélo-palestinien, un phénomène en toile de fond attire l’attention : le double visage des États africains dans ce conflit. Malgré une histoire marquée par la lutte contre le colonialisme et le racisme, l’Afrique se divise sur la question du soutien à la Palestine, mettant en lumière les contradictions des gouvernements africains.
À l’heure où l’Afrique se trouve au cœur d’un débat interne sur son rôle dans le conflit israélo-palestinien, il est essentiel de comprendre le contexte, les motivations et les implications du double visage des États africains face à cette question brûlante.
Les Racines Historiques et Émotionnelles
L’Afrique, ayant elle-même subi les ravages du colonialisme et du racisme pendant des siècles, a traditionnellement affiché un soutien solide envers la Palestine. La lutte des Palestiniens, déracinés de leurs terres en 1948, trouvait un écho chez de nombreux pays africains nouvellement indépendants des régimes coloniaux. La solidarité reposait sur des fondements historiques et émotionnels, alimentée par des expériences communes de lutte contre l’oppression.
C’est notamment le cas de l’Algérie, qui demeure l’un des critiques les plus ardents d’Israël sur le continent. Les relations entre l’Algérie et Israël ont stagné, tandis que le voisin marocain a établi des liens diplomatiques avec l’État hébreu en 2020, soulignant ainsi les divisions en Afrique du Nord.
L’Afrique du Sud, avec son passé d’apartheid, est devenue l’un des plus fervents partisans de la Palestine. Nelson Mandela avait déjà établi un parallèle puissant entre la lutte des Sud-Africains noirs et celle des Palestiniens. Cette position a été largement soutenue par des groupes de défense des droits de l’homme.
L’Évolution des Relations avec Israël
Malgré des liens historiques et émotionnels forts avec la Palestine, de nombreux pays africains ont entrepris de renforcer leurs relations avec Israël, ce qui a modifié leur approche du conflit israélo-palestinien. Le déclencheur de ce changement peut être remonté aux accords de Camp David en 1978, lorsque l’Égypte a signé un accord de paix avec Israël. Dès lors, de nombreux pays africains ont estimé que rester en marge n’était plus une option.
Cette tendance s’est consolidée après les accords d’Oslo en 1993, marquant la fin de l’apartheid en Afrique du Sud. Plus récemment, les accords de normalisation avec des pays tels que le Tchad, le Maroc, le Soudan et même le Togo ont renforcé la présence d’Israël sur le continent.
Les États africains ont progressivement établi des relations diplomatiques et économiques avec Israël. Les réalisations d’Israël dans le domaine agricole ont été particulièrement attrayantes pour de nombreux pays africains confrontés à des défis alimentaires. En outre, les relations commerciales, les offres technologiques de pointe, l’assistance militaire et l’aide humanitaire d’Israël ont séduit des gouvernements cherchant à renforcer leur économie et leurs capacités militaires.
Un Double Visage Diplomatique
L’énigmatique double visage des États africains dans le conflit Israël-Palestine se traduit par des relations à deux facettes. D’un côté, ces pays renforcent leurs liens avec Israël, tout en défendant publiquement la cause palestinienne. Le cas de l’Afrique du Sud est emblématique, en tant que partenaire commercial clé d’Israël en Afrique, tout en exprimant un soutien diplomatique ferme à la Palestine.
Le Togo partenaire par excellence d’Israël n’a pas ouvertement pris position dans le conflit . La sortie de son ministre des affaires étrangères Robert Dussey montre que le pays veut sauvegarder sa relation avec l’Etat Hébreux tout en défendant la cause des palestiniens .
Cette contradiction ne doit pas surprendre. L’Afrique est un continent diversifié, et les divisions sur le conflit israélo-palestinien reflètent souvent des intérêts et des priorités variés. Il est important de se rappeler que les positions des États africains peuvent évoluer en fonction des circonstances, tout comme elles l’ont fait récemment lors de l’invasion russe en Ukraine.
De plus, la société civile en Afrique exerce de plus en plus de pressions pour que les gouvernements adoptent des positions plus tranchées en faveur de la Palestine. L’exemple de l’Afrique du Sud, où le parlement a adopté une résolution visant à réduire les relations diplomatiques avec Israël, illustre ce changement. Les relations commerciales avec Israël pourraient devenir un champ de bataille politique à mesure que la pression publique augmente.
En fin de compte, l’Afrique dévoile son double visage dans le conflit Israël-Palestine, résultant de la complexité des intérêts économiques, des relations diplomatiques et des fondements historiques. La région continue de jouer un rôle essentiel dans ce conflit mondial, tout en naviguant entre ces deux visages, et l’avenir pourrait apporter de nouvelles surprises.