Lomé, 23 octobre 2023 (Lomé Actu) – L’assassinat du Colonel Bitala Madjoulba, un officier de haut rang au Togo, demeure une affaire qui a ébranlé la nation et suscite toujours autant d’interrogations. Depuis le tragique événement qui a eu lieu en mai 2020, cette affaire complexe a laissé émerger de nombreux éléments qui ajoutent à son mystère. Aujourd’hui, alors que le procès s’ouvre, examinons les points clés de cette affaire qui continue de hanter le pays.
Le Colonel Madjoulba, nommé à la tête du 1er Bataillon d’Intervention Rapide (BIR) en 2014, était un officier militaire chevronné. Il avait suivi une formation à l’École de guerre du Cameroun et à l’École nationale des officiers du Sénégal. Il avait également dirigé plusieurs contingents onusiens au cours de sa carrière. Son assassinat a laissé le pays dans l’expectative, cherchant toujours à comprendre les circonstances entourant sa mort.
À l’ouverture de ce procès historique, explorons les éléments clés de cette affaire qui a secoué le Togo et continue de soulever des questions sans réponses.
Le Crime et les Circonstances Mystérieuses
Le 4 mai 2020, le Colonel Madjoulba a été retrouvé mort dans son bureau, créant un vide insupportable pour sa famille et ses collègues. Les circonstances entourant sa mort sont entourées de mystère. Il avait assisté à la cérémonie d’investiture du président Faure Gnassingbé la veille et est retourné à son bureau pour une raison inconnue.
Sa secrétaire, qui dormait à proximité, a découvert son corps le lendemain matin, après avoir entendu des éclats de voix et le Colonel criant « Sors d’ici ! ».
La porte du bureau, normalement fermée, était restée ouverte. Le sang de la victime avait provoqué un court-circuit électrique.
La Mort de sa Femme, Mayen Marie-Grâce Bayilabou
Un élément tragique est venu s’ajouter à cette affaire complexe. Selon le média Gapola , l’épouse du Colonel Madjoulba, Mayen Marie-Grâce Bayilabou, est décédée le 19 octobre 2023, sans avoir pu connaître la vérité sur les circonstances de la mort de son mari. Ce décès a ajouté une dimension humaine poignante à l’affaire et suscité des émotions au sein de la population togolaise.
L’opposition réclame une enquête indépendante
L’opposition togolaise a longtemps exprimé la nécessité d’une enquête indépendante dans l’affaire de l’assassinat du Colonel Bitala Madjoulba. Cette demande émane de plusieurs préoccupations, notamment en ce qui concerne l’impartialité de l’enquête menée par la justice militaire et le désir de faire toute la lumière sur cette affaire mystérieuse.
L’opposition a soutenu que l’implication de la justice militaire soulève des inquiétudes quant à son indépendance par rapport aux forces armées et au gouvernement en place. Pour garantir une enquête transparente et impartiale, l’opposition a plaidé en faveur de l’implication d’une instance indépendante, telle qu’une commission d’enquête civile, qui pourrait mener des investigations approfondies sans interférence politique.
L’Intervention de la France
Une tournure décisive dans cette affaire a été l’intervention de la France. En juillet 2020, soit plus de deux mois après le drame, le Togo a sollicité l’expertise de la justice française pour des analyses balistiques. La France a ainsi été sollicitée pour mettre son expertise à la disposition des enquêteurs togolais.
Dans le cadre de cette coopération, 75 pistolets et leurs cartouches ont été envoyés en France pour être comparés avec la balle extraite du corps du Colonel Madjoulba. Ces expertises balistiques étaient censées jouer un rôle crucial dans l’identification des auteurs du crime.
Les Accusés et le Général Abalo Kadangha
L’affaire Madjoulba a conduit à des accusations graves. L’ancien chef d’État-major général des Forces Armées Togolaises, le général de division Abalo Kadangha, est poursuivi pour « complicité d’assassinat, complicité d’entrave au bon fonctionnement de la justice et complot contre la sûreté intérieure de l’État ». .
Hypothèses sur les Motifs de l’Assassinat
Les motifs de l’assassinat du Colonel Madjoulba ont été largement spéculés, sans qu’une réponse claire n’ait émergé jusqu’à présent. Plusieurs hypothèses ont été avancées, y compris des rivalités ethniques au sein de l’armée, des conflits liés à d’éventuels trafics, ou même un message adressé au clan présidentiel. Cependant, les véritables raisons de cet assassinat demeurent floues et incertaines.
Pourquoi la Justice Militaire ? Un Choix qui Interroge
L’une des interrogations centrales dans l’affaire de l’assassinat du Colonel Madjoulba réside dans le choix de la justice militaire pour mener l’enquête. Le Colonel Madjoulba étant un haut gradé de l’armée togolaise, il peut sembler naturel que cette juridiction ait été sollicitée pour enquêter, d’autant plus que le crime s’est produit dans un contexte militaire.
Cependant, il convient de noter que ce tribunal militaire n’a été mis opérationnel que récemment, le 9 octobre, pour être précis. Ce détail soulève des questions légitimes sur l’indépendance et l’impartialité de l’enquête. La création d’une nouvelle juridiction militaire en vue de cette affaire suscite des inquiétudes quant à sa capacité à mener une enquête transparente, en toute impartialité, sans aucune influence extérieure.
Face à ces préoccupations, certains ont plaidé en faveur de l’implication d’une instance civile indépendante pour garantir une enquête véritablement équitable et transparente, qui puisse faire toute la lumière sur cette affaire complexe. Alors que le procès s’ouvre, la question de la compétence de la justice militaire reste au cœur des débats, ajoutant une dimension supplémentaire à ce dossier déjà complexe.
L’ouverture du procès de l’assassinat du Colonel Madjoulba est attendue avec impatience. La famille du Colonel, ses proches, et le peuple togolais espèrent que ce procès apportera enfin la lumière sur cette affaire mystérieuse. Les enjeux sont énormes, et l’affaire Madjoulba continue de soulever des questions sur la justice, la transparence et la responsabilité au sein des institutions militaires togolaises.
