« Je ne suis absolument pas d’accord…  » : Gerry Taama réagit au communiqué du Ministère de la Culture

Lomé, 8 Juin (Lomé Actu) – Dans une déclaration récemment faite par le Ministre de la Culture et du Tourisme, le Dr Kossi Lamadokou, des mesures disciplinaires ont été annoncées à l’encontre des artistes et autres acteurs culturels qui créent des contenus préjudiciables aux efforts déployés par le gouvernement pour promouvoir les valeurs morales, la citoyenneté et le patriotisme. Cependant, elles ne sont pas approuvées par le député Gerry Taama.

L’homme politique togolais a exprimé son désaccord face à cette directive dans un poste publié sur sa page Facebook.

« Communiqué de presse du ministre de la culture sur la protection des mœurs, je suis absolument pas d’accord

Je sais que certains attendent ma réaction et certains seront déçus, mais l’artiste et l’homme politique qui vivent en moi ne peuvent pas accepter ceci.

Mais avant de critiquer, je dois préciser ceci : le ministre est dans son non droit et a été très prudent. Il ne vise que la chanson et le cinéma (encore que que je ne sais pas ce que le cinéma cherche la bas) qui sont des domaines qui sont de son ressort. Il cite les moyens d’action réglementaires, pas grand-chose vu ce que butodra verse aux artistes, et va plus loin en citant les dispositions judiciaires. Mais comme les gens ne connaissent pas le droit, ils ne voient pas que l’article parle des diffuseurs, pas des auteurs. Parce que justement la loi ne peut pas brider la création artistique. Mais bon, le ministre fait son travail en essayant de conscientiser. Mais tout en étant dans son bon droit, il a tout faux.

Quand vous traversez des centaines de pays au monde, vous voyez de superbes statues en bronze et en marbre de personnes nues, avec les attributs sexuels exposés. La renaissance italienne, avec Donatello et Michel Ange, a complètement révolutionné l’art occidental. Et ça ne choque personne. Au Japon, il y’a même un rituel populaire consacré au phallus. Mieux, aujourd’hui les musiciens les plus connus dans le monde et les mieux payés sont les rapeurs, et ce ne sont pas des enfants de chœur. C’est toujours l’art. Et le monde apparemment aime ça. Faudra-t-il interdire les fêtes traditionnelles dans les lacs, au motif que les femmes exhibent leur poitrine ? Ou d’autres danses traditionnelles ou les femmes se trémoussent de manière lascive ?

L’art n’a jamais eut comme mission d’adoucir les mœurs, mais de célébrer le génie humain, de pousser au plus loin la créativité humaine, dans les limites de ce qui est éthiquement acceptable.

Monsieur le ministre, je suis de ceux qui déplorent la faible dotation financière de votre ministère. Disons-nous la vérité, vous ne pouvez pas faire grand-chose pour les artistes togolais et ce n’est pas votre faute, vous n’avez pas les ressources, mais de grâce, ne les menacez pas. L’artiste Ghettovi par exemple, qui peut être trash dans ses chansons, représente l’avenir du rap togolais. Ne le bridez pas, ne cassez pas l’élan de cette jeunesse à qui vous ne pouvez rien offrir en échange.

Le vrai sujet que vous avez occulté est l’éducation morale de la jeunesse. Jusqu’à l’âge de 25 ans, je n’avais jamais regardé un film pornographique parce que mes parents m’avaient fait comprendre que c’était mauvais. Il y avait des ciné clubs dans mon quartier et les copains allaient se rincer les yeux. C’est cette éducation qui est la clé. Parce que lorsque vous aurez mis au pas les artistes togolais, vous n’empêcherez pas les Togolais d’écouter la musique grivoise ivoirienne. Qui i empêchera les jeunes de suivre les films porno sur internet, et les exhibitions sur tiktok, qui va contrôler cela ? L’éducation de nos enfants est la clé.

Mais ceci reste un bel exercice. Chacun joue son rôle. C’est le principe du débat contradictoire. Moi personnellement, je crois qu’il y a des sujets plus importants au ministère de la culture. Nous avons besoin d’un palais de la culture avec plusieurs salles et une grasse salle pouvant accueillir 5000 personnes. Le palais du congrès n’est pas une salle de spectacles, mais de conférences. Founoufa.

Nous ne sommes pas Iran ici. Pas besoin d’une police des mœurs, mais nous avons besoin de producteurs car nos artistes chanteurs souffrent trop. Ils font tout sur fonds propres et n’arrivent même pas à faire des concerts, tant, c’est cher à organiser. Et même quand ils y arrivent, ils croulent sous les dettes par défaut de spectateurs… Même un concert à 2000 f ne remplit pas le palais. Les gens sont trop pauvres. Le vrai problème est là, monsieur le ministre. Les artistes souffrent trop.

Que pensez-vous du communiqué du ministre ? Ce qui est même incompréhensible, c’est le silence des intéressés. Pays là est dangereux. Bref.

Soyons des artistes créatifs, vivants« . A-écrit Gerry Taama.

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